Au Foyer Lataste, nous accueillons régulièrement des bénévoles qui s’impliquent sur des missions variées pour de courtes durées. Depuis la réouverture du pays fin 2021, nous avons été ravis de recevoir de nombreuses demandes pour venir nous aider sur le terrain !
Rappelons cependant que les missions de bénévolat se font toujours en complément d’un appui à l’équipe locale pour les besoins du moment. En effet, le volontariat à l’étranger peut faire plus de mal que de bien s’il n’est pas bien encadré.
Depuis quelques années, nous entendons beaucoup parler d’une économie grandissante, le « volontourisme ». Ce terme est la contraction de « volontariat » et « tourisme », et désigne un type de voyage qui intègre le volontariat dans des vacances dans un pays en développement, souvent dans le but de donner du sens à son voyage. Le volontourisme implique souvent un travail à court terme et non qualifié, comme construire des maisons, donner des cours d’anglais informels ou aider à s’occuper d’enfants dans un orphelinat.
En effet, être confronté au niveau de pauvreté qui existe dans les pays en développement peut être déstabilisant. Il est courant que les touristes se sentent obligés de « faire le bien » et de « donner en retour » pendant leurs vacances. Cependant, sans comprendre la situation dans son ensemble, leurs bonnes intentions peuvent avoir des conséquences néfastes pour les communautés locales.
Dans un article pour The Guardian, Tina Rosenberg explique combien de nations ont continué à construire et maintenir des orphelinats (malgré leur inefficacité avérée par rapport aux systèmes de placement familial) simplement parce qu’il y a de l’argent à gagner avec des touristes bien intentionnés qui souhaitent faire du bénévolat auprès d’enfants.
Le désir des étrangers d’aider les enfants dans les orphelinats encourage l’institutionnalisation des enfants, en créant une activité rentable. Les enfants peuvent être placés dans des conditions de vie délibérément pauvres pour susciter une réponse plus émotionnelle et l’augmentation des dons des visiteurs. Ces dérives arrivent malheureusement plus souvent qu’on ne le croit et peuvent, dans des cas extrêmes, conduire à la traite des enfants.
Ensuite, il y a aussi le fait que le volontourisme avec des enfants a un impact sérieux et permanent sur leur développement psychologique et émotionnel. La chose la plus importante dont les enfants ont besoin pour bien grandir est un attachement stable et stimulant, ce qui n’est pas compatible avec les courtes durées des bénévoles. Un roulement élevé des adultes dans la vie des enfants aggrave les troubles de l’attachement et peut provoquer des traumatismes émotionnels à vie.
La majorité des touristes volontaires ne sont pas qualifiés pour la mission qu’ils vont effectuer, que ce soit des travaux de construction ou s’occuper d’enfants orphelins. Des activités comme celles-ci peuvent sembler un excellent moyen d’aider mais fragilisent au final les populations et les communautés locales. Faire du travail qui pourrait être fait par les locaux a un impact sur les économies locales, enlevant des emplois aux habitants du pays qui sont qualifiés et qui ont besoin de ce travail.
Cette façon colonialiste d’« aider » néglige l’expertise locale et perpétue un stéréotype problématique selon lequel les communautés en développement sont intrinsèquement impuissantes et incapables de résoudre leurs propres problèmes. Cela entretient également le complexe du « sauveur blanc » et l’hypothèse incorrecte selon laquelle les pays en développement ont désespérément besoin de l’aide de l’Occident.
Ainsi, la meilleure façon d’aider n’est pas de prendre le relais et de faire des choses à la place, mais d’utiliser ses compétences, sa richesse et son expertise pour accompagner les communautés à développer les moyens de construire leur propre avenir.
Au Foyer Lataste, nous sommes conscients des enjeux complexes liés au bénévolat. Nos programmes visent à maintenir au maximum les enfants dans leur famille ou leur communauté, en mettant en place des solutions d’accompagnement adaptées. Seuls les enfants en danger immédiat sont accueillis au Foyer, dans un cadre propice à leur bon développement, et les relations avec leur famille sont maintenues et encouragées.
Les missions de bénévolat proposées sont préparées à l’avance, elles répondent toujours à un besoin précis du terrain, et ne doivent pas remplacer le travail qui pourrait être fait par quelqu’un localement. L’association a pour principe fondamental le développement d’actions menées par des Cambodgiens, pour les Cambodgiens. Sur le terrain, ce sont plus de 40 Cambodgiens qui mènent à bien les actions de l’association, appuyés par un(e) volontaire Français(e) qui s’occupe de la coordination des programmes, de la gestion financière et de la communication.
Rédigé par Coline Cimetière, coordinatrice de terrain
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